Jacqueline Amiel-Donat
Fabrice Lorente président de l'UPVD
Je viens de lire sur un blog d’information (ouillade.eu) que les trois députés PS du département auraient affirmé suite à une
réunion à l’Université de Perpignan « la nécessité de maintenir un service public de l’enseignement supérieur, afin de permettre aux habitants et aux étudiants des Pyrénées-Orientales d’avoir une
université de qualité et de proximité jusqu’en licence, tout en développant, comme l’Université a su le faire jusqu’à aujourd’hui, des filières d’enseignement et de recherches spécifiques, qui se
classent souvent parmi les premières au niveau français et européen comme le laboratoire PROcédé et Matériaux de l’Energie Solaire (PROMES), classé 1er laboratoire européen sur les énergies
solaires.Les parlementaires ont réaffirmé leur profond attachement au principe d’égalité des chances et ont salué le travail remarquable comme le dévouement de la communauté universitaire
».
La communauté universitaire dont nous faisons partie vous et moi, ne peut que se réjouir de l’intérêt qu’ils semblent manifester pour notre établissement, mais je
vous sais pareillement pragmatique et peu enclin à vous laisser endormir par les flatteries politiciennes. C’est la raison pour laquelle je me permets d’attirer votre attention sur la volonté
politique qui ressort de ces propos de non universitaires de toute évidence : « jusqu’en licence … ». Autrement dit, pour nos trois députés qui ignorent tout du cursus universitaire, le fait de
garantir que l’UPVD assurerait toujours ses enseignements « jusqu’en licence » (hormis bien sûr quelques filières spécifiques ), serait suffisant pour garantir la pérennité de notre
Université…
Comment peut-on prétendre préserver notre Université en lui garantissant un destin de simple « collège universitaire », limité à la formation des Bac +3, les
Masters étant réservés aux Universités de Montpellier ou de Toulouse (…) ?
Ont-ils mesuré l’impact évident de cette limitation des enseignements de notre Université, sur les effectifs de licence 3 – qui seront enclins à déserter Perpignan
et à aller obtenir leur licence 3 à Montpellier ou Toulouse pour avoir plus de chances d’y être admis ultérieurement en Master 1 ? S’agissant de ceux qui en auront les moyens financiers bien
entendu, pas pour les autres…
Pour les autres justement, ont-ils annoncé la création de bourses d’études ou d’une prise en charge financière des étudiants brillants qui seront contraints d’aller
poursuivre leurs études en dehors de Perpignan ? Puisque nos trois députés sont également en charge de responsabilités au département des P.O. ou à la Région L.R., ont-ils même pensé à la mise en
place d’aides financières locales pouvant pallier l’insuffisance des moyens de l’Education nationale à cet égard ? Pour un étudiant qui devra se loger et se nourrir à Montpellier, Toulouse ou
ailleurs, ce n’est pas l’octroi d’un ordinateur qui résoudra les problèmes financiers auxquels il sera confronté…
Comment peut-on se prétendre attaché au principe d’égalité des chances lorsqu’on sacrifie toute perspective pour un étudiant qui n’en a pas les moyens financiers,
d’accéder aux plus hautes formations (et par là, aux meilleurs chances d’accéder à un emploi) ? Ont-ils conscience du fait que notre département bat tous les records de pauvreté et de taux de
chômage et que dès lors, une véritable Université de proximité (comme ils nous qualifient) se doit – ce que nous avons réussi à faire jusqu’à ‘à présent, hormis la médecine- de proposer des
formations de qualité et complètes : Master et Doctorats .
Ils auraient fait état de la Recherche également, mais savent-ils que les Master 2 constituent le creuset du recrutement de thésards et de chercheurs ? Se sont-ils
engagés, toujours au titre des mandats départementaux et régionaux qu’ils cumulent, à financer « décemment » l’Université de Perpignan afin justement que nous puissions maintenir et développer
ces filières spécifiques ?
Là où nous attendions qu’ils annoncent un renforcement des moyens octroyés à l’Université de Perpignan afin de lui permettre, outre son « ossature » complète de
grandes filières de formations, de jouer pleinement son rôle de tête de pont de filières transfrontalières et euro-méditerranéennes, ils avouent benoîtement le triste sort que nous réserve la
mise en place de la réforme – le même d’ailleurs que celui auquel nous destinait (mais plus habilement) la réforme Pécresse et contre laquelle nous nous étions insurgés…
Ils ignorent qu’une Université, même « petite » comme nous l’avons toujours été, peut « tirer vers le haut » tout un territoire. Ils ignorent que J.M.G. LE CLÉZIO
avait choisi de soutenir sa thèse à l’Université de Perpignan (ce qu’il relate dans un de ses ouvrages), que Umberto ECCO avait présidé à deux reprises des Colloques internationaux à l’Université
de Perpignan, que de nombreux hauts magistrats comme le Procureur actuel de Paris, sont issus de notre Université, que le taux de réussite de nos étudiants à des concours nationaux, et notamment
en Droit, est parmi les meilleurs, et que le taux d’insertion en entreprises d’étudiants formés à l’IAE (que j’ai fondé) était le plus fort de France (au point d’ailleurs que l’IAE de Paris avait
décidé d’en être partie prenante). Sans oublier bien sûr, les filières scientifiques et laboratoires de recherche associés : le Parc naturel marin dont nos députés élus locaux s’enorgueillissent,
n’existerait pas si depuis des décennies déjà, l’Université ne s’était pas intéressée aux fonds marins avec le centre d’océanologie de Banyuls… Même chose encore pour l’énergie solaire grâce aux
équipes universitaires de formation et de recherche travaillant souvent avec des moyens financiers dérisoires et dans l’incompréhension absolue, voire l’hostilité, des élus locaux …
Je vais arrêter là mais vous le savez, je ne peux rester indifférente au devenir de notre Université. Ayant choisi cette Université à la sortie du concours
d’agrégation de Droit, y ayant occupé des fonctions importantes (Vice Présidente, Doyen de la Faculté de Droit et de Lettres puis Directrice de l’IAE), j’ai activement participé au combat pour en
obtenir le développement : c’est à ma demande que la Fac de Lettres devait être scindée (afin de prendre toute son ampleur) de la Fac de Droit et Sciences économiques lors du premier contrat
quadriennal ; de même c’est à ma demande et sur mon énergie que devait être implantée et développée avec le succès qu’on lui connaît, la filière « Aménagement et urbanisme » (avec l’école
d’architecture de Montpellier), ou encore que devaient être créées les Presses universitaires de Perpignan, ou enfin qu’était créé l’IAE avec l’ensemble du monde économique local et régional sous
l’égide de Michel JOBERT, alors Ministre du Commerce Extérieur, et sous la présidence de Laurent SPANGHERO puis de Raymond MITJAVILA …
Sachez que bien qu’étant membre du même parti politique que les trois députés que vous avez reçus, je n’en partage pas la naïveté/docilité, et que je saurai
combattre à vos côtés pour que notre Université de Perpignan ne soit pas la « sacrifiée » d’un projet politique qui apparaît verrouillé nationalement et localement. Je peux vous assurer également
que les représentants des autres partis de gauche, membres de notre groupe d’opposition municipale, Olivier AMIEL pour le MRC et Jean CODOGNES pour EELV, seront mobilisés avec nous. Peu
importeront d’ailleurs les étiquettes ou options politiques de ceux qui, comme nous, sauront se mobiliser pour notre Université de Perpignan.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président et Cher Collègue, en la sincérité de nos engagements.Jacqueline Amiel Donat