Entre Narbonne et Toulouse, Paul Jorion se laisse entrainer pour une soirée à Perpignan, avec le soutien de la Librairie Torcatis et du Centre d'art contemporain Acentmetresducentredumonde.
Paul Jorion ! C’était il y a déjà plus de 5 ans, au printemps 2007… Paul Jorion nous écrivait sur son blog depuis Santa Monica, Californie, comme depuis un poste avancé sur une ligne de front, annonçant l’ouragan qui s’abattait sur le monde sous la forme d’une effroyable crise du système financier mondial. Cet ouragan, il en avait vu les prémisses dès 2002, se trouvant au cœur même de la machine à fabriquer les fameux contrats « subprime », comme ingénieur financier chez IndyMac, Wells Fargo, puis Countrywide Financial. Dès 2004, il avait rédigé un ouvrage intitulé « La crise du capitalisme américain », qui ne trouva son éditeur qu’en 2007, en France, par l’entremise d’un Jacques Attali bien inspiré. Lecteurs de son blog, alors encore assez peu nombreux, nous avions l’impression excitante de faire partie d’un club d’initiés, en constatant fiévreusement jour après jour la réalité du scénario dont il décrivait les rouages. Incapables de faire partager à notre entourage le vertige qui nous saisissait devant l’étendue de la crise qui se dessinait, nous étions victimes des moqueries de ceux qui ne voyaient rien d’inquiétant venir à l’horizon.
Puis vint la chute de la banque Lehman Brothers et la tempête qui soufflait devint pleinement perceptible aux yeux du grand public. Licencié depuis 2007 par Countrywide en faillite, inquiet de la dégradation du climat social aux Etats-Unis et appelé par son éditeur français à venir défendre ses ouvrages dans les médias de l’hexagone, il résolut de rentrer en Europe pour s’installer finalement en Bretagne, plutôt que dans son propre pays, la Belgique.
Dans la presse, où les pseudos experts économiques déconfits bredouillaient confusément leur désespoir avant de se ressaisir plus tard avec toujours plus de cynisme, Paul Jorion était réclamé par tous ceux, journalistes, politiques ou institutionnels qui cherchaient à comprendre cet écroulement subit du secteur financier et en mesurer les conséquences. Et, avec parfois les difficultés de quelqu’un qui n’a plus parlé le français pendant des années, langue qui ne lui est d’ailleurs pas maternelle, Paul leur expliquait, à la radio, à la télé, dans les journaux, dans les colloques, les assemblées et partout on l’écoutait attentivement en réalisant l’ampleur de l’escroquerie, dont Bernard Madoff n’était qu’une représentation minable.
Le blog de Paul est désormais l’un des repères incontournables de l’actualité économique, avec une fréquentation mensuelle qui ne descend pas en dessous des 300 000 visites, avec des pics à près de 600 000 au plus fort des soubresauts de la crise. Les très nombreux commentaires laissés par les lecteurs font de ce blog un lieu d’échange d’information et de réflexion exceptionnel, un véritable « cerveau collectif », comme Paul aime le présenter. Enrichi par les brillantes analyses quotidiennes de François Leclerc, qui déchiffre inlassablement dans la presse internationale les nouvelles économiques pour en extraire l’essentiel, et par les billets rédigés régulièrement par d’autres invités, il propose une réflexion et une sensibilité qui dépassent de loin les limites de la sphère économique. Car Jorion, élève de Claude Lévi-Strauss et du mathématicien Georges-Théodule Guilbaud, est avant tout un chercheur en sciences sociales, qui s’approprie en érudit tous les domaines du savoir pour mieux les partager. Très loin de l’image du trader millionnaire sous cocaïne, on distingue dans ses récits le portrait d’un amoureux des systèmes logiques et des modélisations mathématiques, un philosophe geek qui ne s’est sans doute pas résigné sans regrets, à l’époque, à quitter la « République populaire de Santa Monica » et les plages de Venice.
Ce sera donc un rare privilège et un très grand plaisir que d’accueillir Paul Jorion à Perpignan le 13 septembre prochain, à 100 mètres du centre du monde, pour l’écouter parler de son nouveau livre, qui sort très prochainement chez Fayard, intitulé « Misère de la pensée économique ».
Le 13 juin au Centre d'art contemporain A cent mètres du centre du monde, conférence-débat animée par Nicolas Caudeville.
Paul Jorion sera les 11 et 12 septembre, en soirée, à la Médiathèque de Narbonne pour la projection-débat en deux parties du documentaire "Noire Finance" - en avant-première de sa diffusion sur Arte - et à Toulouse le 14 septembre à 19h dans la salle Sénéchal de la Mairie de Toulouse.
Le blog de Paul Jorion : htpp://www.pauljorion.com/blog
Ouvrages de Paul Jorion
- Les pêcheurs de Houat : anthropologie économique, coll. « Savoir », Hermann, Paris, 1983 (ISBN 2-7056-5951-x)
- La transmission des savoirs (avec Geneviève Delbos), éd. de la Maison des sciences de l’Homme, Paris, 1984, (ISBN 2-7351-0113-4)
- Principes des systèmes intelligents, Dunod, Paris, 1997, (ISBN 2-225-81938-6) (original éd. Masson, 1990)
- Investing in a Post-Enron World, McGraw-Hill, New York, 2003, (ISBN 0-07-140938-6)
- Vers la crise du capitalisme américain ?, La Découverte, Paris, 2007, (ISBN 978-2-7071-5092-9) ; Éditions du Croquant, Broissieux, 2009, (ISBN 2914968620)
- L'implosion : la finance contre l'économie : ce qu’annonce et révèle la "crise des subprimes", Fayard, Paris, 2008, (ISBN 978-2-213-63741-9)
- La crise : des subprimes au séisme financier planétaire, Paris, Fayard, 2008 (ISBN 978-2-213-63860-7)
- L'argent, mode d’emploi, Paris, Fayard, 2009 (ISBN 978-2-213-64404-2)
- Comment la vérité et la réalité furent inventées, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des sciences humaines », 2009 (ISBN 978-2-07-012600-2)
- Le prix, Broissieux, Éditions du Croquant, 2010 (ISBN 978-2-9149-6878-2)
- Le capitalisme à l'agonie, Paris, Fayard, 2011 (ISBN 978-2-213-65488-1)
- La guerre civile numérique, Paris, Textuel, 2011 (ISBN 2845974205)