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L'archipel Contre-Attaque

  • : L'archipel contre-attaque !
  • : Depuis les émeutes de mai 2005, la situation de Perpignan et son agglomération(que certains appellent l'archipel) n'a fait que glisser de plus en plus vers les abysses: l'archipel contre attaque en fait la chronique!
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5 novembre 2019 2 05 /11 /novembre /2019 21:46

"Un sans-abri de 54 ans, en fauteuil roulant, a été retrouvé mort lundi dans une rue, à Perpignan, dans les Pyrénées-Orientales, indiquent à 20 Minutes les sapeurs-pompiers.

C’est une habitante du quartier qui a donné l’alerte. A leur arrivée sur place, lundi matin, dans le quartier du Pont-d’en-Vestit, les secours n’ont pu que constater le décès de ce quinquagénaire, qui vivait dans la rue. Selon L'Indépendant, le sans-abri a été retrouvé allongé au sol, sans vie, à côté de son fauteuil."   journal 20 minutes

Cecile Creixell dessinatrice et militante à la lecture de cette information elle écrit et retrouve le dessin qu'elle avait faite de lui

"J'ai pleuré en lisant l'annonce de sa mort. Il ne peut s agir, à la description qui est faite de lui que de Dominique. Je l'ai rencontré une fois, en accompagnant une amie bénévole qui faisait une maraude de soins. Il m'a fait l'impression d une personne très intelligente (il aimait les sciences humaines et son drame était qu' il devenait aveugle graduellement et ne pouvait plus lire des textes de philo ou de psychanalyse, comme il l'aurait voulu).

Sans doute parce que j'étais avec Marylin, qui était une des rares personnes à le connaître vraiment et à s intéresser véritablement à lui. Il a été très aimable avec moi, on a bu un café et je lui ai offert un paquet de clopes. Il m'a souri avec ses yeux au dessus de sa grosse barbe blanche et rousse. Nous devions nous revoir, je devais passer du temps avec lui pour lui lire les "microfictions" de Régis Jeoffret.

Je l ai cherché en vain, il changeait souvent de secteur car il se faisait agresser, tabasser alors qu il était en fauteuil, faible comme un oisillon.

Même les Sdf que j'interrogeais, chaque fois que je le cherchais, le jugeaient mal car il buvait, était sale, insultait parfois les gens... On a toujours ce besoin de juger, de mépriser pour se sentir un peu au dessus: c' est tristement humain et très répandu . Mais la vie de cet homme est ce qui ressemble le plus pour moi à l'enfer sur terre. Pour le peu que je connais de son histoire, il a été rejeté et maltraité dès l'enfance, n a jamais reçu d amour, il vivait à la rue, dans un fauteuil roulant aussi déglingué que lui, la bière l aidait à épaissir le brouillard entre lui et ce monde trop dur.

Il ne dormait que d un œil la nuit...

Il se faisait régulièrement dépouiller de ses maigres hardes, insulter, frapper par des bandes de gamins sadiques comme seuls des gamins sans cervelle ni éducation peuvent l être.. Il était sale, disait l'un, il sentait ' autre, certains osaient mettre en doute son handicap... J ai vu ses pieds, enflés, crevassés, couvert de croûtes... Même un valide ne pourrait pas se tenir debout sur ces pauvres pieds boursouflés, gercés et meurtris.... Moi aussi si j avais été dans la situation exacte de Dom, j aurais pué, j aurais bu, j aurais agoni les gens d' insultes.

Les larmes me sont montées aux yeux ce matin en lisant la nouvelle de sa mort.

C'était un homme rugueux, abîmé autant physiquement que dans sa tête, et plus encore détruit dans son corps. mais c était un homme intelligent, instruit, curieux. Il avait de l'humour... Noir et amer bien sûr.... Je voulais vraiment le revoir, d'en savoir plus sur lui. J avais mis des piles dans un ancien transistor que je voulais lui donner pour qu'à défaut de lire de la philo il puisse en écouter sur France Culture. Depuis que je l'avais rencontré j'ai souvent pensé à lui, je l'ai souvent cherché, j ai eu peur pour lui lors des intempéries... La rue a fini par avoir sa peau...

RIP                       "

"Ceux qui ont pris tout le plat dans leur assiette, laissant les assiettes des autres vides et qui, ayant tout disent, avec une bonne figure, une bonne conscience: "Nous... nous, qui avons tout, on est pour la paix !". Tu sais c'que j'dois leur crier, à ceux-là : "Les premiers violents, les provocateurs de toute violence, c'est vous !"

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commentaires

J
Je ne suis allé à Perpignan qu'une fois, en août dernier, mais j'y ai croisé le bonhomme ; mimant fumer de deux doigts pour demander des clopes sans dire mot à la terrasse d'un Domino's pizza. <br /> Il s'est effectivement fait insulter et menacer gratuitement par à peu près tout le monde ce soir-là, c'était insupportable...<br /> Même quand j'ai proposé une pizza il est resté muet, mais il l'a mangée, comme un homme brisé qui n'attend que de s'éteindre...<br /> Le voilà enfin soulagé.
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S
C'est très humain ce témoignage, et cela fait écho à ce que je raconte à mon fils, par ces récits anciens, un geste antique, qui va au-delà dans l'Histoire de la charité chrétienne, mais au plus profond de notre culture grecque, qui prône l'hospitalité comme un devoir fondamental, Antiquité qui nous fait retrouver ce qui fait l'individu, sa particule, un sujet, un Mr, un prénom, et qui le fait alors rentrer par ce geste d'hospitalité dans le royaume des morts alors qu'on lui a refusé son humanité jusqu'alors, lorsqu'il était vivant et qu'il n'était qu'un sigle, un mendiant, tel ulysse qui revient à cette condition la plus humiliante d'être roué de coups et d'être moqué car il est sale et vieux et surtout qu'il est personne. Or personne n'est sensé ne plus avoir de nom. C'est insensé et ça rend fou. Ne plus avoir de nom fait perdre la raison et nul n'est sensé ignoré cette Loi, que sans nom on en meurt. Que les sigles, les acronymes, toutes ces idéologies, cette mauvaise littérature, les fausses paroles font mourir les gens. Or ce geste, ce petit article redonne un nom à Dominique et cela est très juste et c'est le début de toutes les épopées, de l'odyssée d'un mendiant comme Ulysse qui redevient roi en sa demeure à celles des Misérables et de Dominique retrouvé mort dans la rue, comme d'autres personnes et que cet article va nommer, enfin...
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F
un bien bel hommage que vous rendez à cet homme, merci pour lui.
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