L’élection, ou le triomphe sardonique du néant démocratique
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L’élection, ce rituel que l’on nous vend comme l’apothéose de la liberté, n’est plus qu’une farce grotesque, un théâtre d’ombres où les pantins s’agitent pour la gloire d’un titre, jamais pour le pouvoir. Comme l’écrivait Cioran, « l’homme est une marionnette qui se croit libre parce qu’elle ignore les ficelles qui la meuvent ». Et quelles ficelles ! Le mandat, jadis promesse d’action, n’est plus qu’un hochet doré, un bâton de maréchal pour le bourgeois en quête de notabilité. Le pouvoir ? Évaporé, dissous dans les méandres des bureaucraties, des lobbies et des marchés. Quant au « mandat impératif », cette idée saugrenue que l’élu devrait honorer ses promesses, elle est honnie, car elle révélerait l’imposture : les élus ne décident de rien, ou si peu. Les électeurs, ces gueux modernes, se pressent aux urnes pour quémander l’aumône d’un regard, d’une écoute, comme des serfs implorant leur seigneur.
Prenons l’exemple récent des élections françaises de 2024, où le taux d’abstention a frôlé les 50 % dans certaines circonscriptions, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur.
La moitié du peuple, lassée de ce cirque, a préféré l’inaction à l’illusion. Et comment leur donner tort ? Les promesses de campagne, ces poèmes en prose, s’effacent dès le lendemain du scrutin. Souvenez-vous de Macron en 2017, jurant de réconcilier les Français, de réformer sans brutalité. Huit ans plus tard, les Gilets jaunes, les grèves et une polarisation extrême témoignent de l’abîme entre le verbe et l’acte. Cioran aurait ricané : « L’homme politique est un poète raté qui se venge en promettant l’impossible. »
Aux États-Unis, le spectacle est plus criard encore.
Les élections de mi-mandat de 2022 ont vu des milliards de dollars engloutis dans des campagnes où les candidats, selon le Center for Responsive Politics, ont dépensé en moyenne 5,4 millions de dollars par siège à la Chambre des représentants. Pour quoi ? Pour des strapontins dans une machine législative grippée, où les lobbies dictent les lois et où le Congrès, avec un taux d’approbation de 20 % selon Gallup, est moins respecté qu’un marchand de tapis. Le peuple vote, oui, mais pour des titres ronflants – sénateur, gouverneur – qui masquent l’impuissance. Comme le disait Cioran : « Le pouvoir n’existe plus ; il n’y a que des apparences de pouvoir, et des hommes assez naïfs pour s’en parer. »
Et que dire de cette quête de notabilité, ce prurit bourgeois de devenir « quelqu’un » ?
Les élus, ces petits marquis de province ou ces parvenus des métropoles, collectionnent les médailles et les rubans comme des enfants des autocollants. Prenez l’exemple de ces maires de petites communes, en France, qui s’accrochent à leur écharpe tricolore comme à une bouée, organisant des kermesses et coupant des rubans pour se sentir exister. Un article du Monde de 2023 rapportait que 80 % des maires de communes de moins de 500 habitants se représentaient, non pour « changer les choses », mais pour « le prestige local ». Le bourgeois devenu notable savoure son titre, tandis que le gueux, l’électeur, lui adresse des courbettes, quémandant une subvention ou un passe-droit. Cioran, encore : « L’homme ne veut pas être libre, il veut un maître qu’il peut supplier. »
Le mandat impératif, cette relique d’un temps où l’élu était comptable de ses engagements, est désormais une hérésie.
Pourquoi obliger un député à suivre son programme, quand il n’a ni le pouvoir ni l’envie de le faire ? Le système s’effondrerait sous le poids de sa propre vacuité. En Allemagne, une proposition de loi en 2023 visant à renforcer la responsabilité des élus a été balayée d’un revers de main par le Bundestag, arguant que cela « limiterait la liberté des parlementaires ». Liberté de quoi ? De trahir sans vergogne ? De promettre la lune pour mieux servir les puissants ? Cioran, toujours lui, avait vu juste : « La démocratie est une comédie où chacun joue un rôle, sauf le peuple, qui croit encore au texte. »
Ainsi va l’élection, ce rituel vidé de sens, où le bourgeois parade, où le gueux s’incline, et où le pouvoir, ce grand absent, ricane dans l’ombre.
Nous votons, non pour choisir, mais pour consacrer. Nous votons, non pour agir, mais pour entretenir l’illusion. Et dans ce grand bal des vanités, Cioran, perché sur son nuage de désespoir, murmure : « L’humanité est une farce qui se prend au sérieux. »
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