/image%2F0934504%2F20160926%2Fob_212712_agenda-268805.jpg)
Des figures politiques françaises de premier plan se sont récemment exprimées en faveur de l’interdiction de tout signe d’appartenance religieuse dans l’espace public, entendre par là les rues, les places, les prairies, les sous-bois.
De bons auteurs, dont Jacques Sapir, semblent se réjouir de ces projets, y voyant un élément de reconquête de la souveraineté républicaine.
On peut cependant risquer une autre hypothèse: la laïcité offensive, comme caractère nouveau d’une vie occidentale en voie de consolidation.
L’Occident contemporain est un phénomène encore peu étudié et largement inconnu.
On peut cependant citer quelques noms: Zinoviev, Debord, Muray, Houellebecq. De l’Occident, on peut déjà dire un certain nombre de choses. Nous sommes en présence d’une forme de super-société, qui se superpose partiellement aux anciens Etats Occidentaux, sans coïncider avec eux; cette super-société, en voie de consolidation, longue, douloureuse, contradictoire comme tout processus historique, s’incarne déjà dans un certain nombre de structures juridiques constituées (et contestées): OTAN, Union Européenne, Traité Transatlantique en devenir, etc.
Sur le plan politique, la vie occidentale s’accompagne d’un droit donné aux citoyens de choisir, pour gouverner, entre des candidats aux opinions et aux caractéristiques sociales parfaitement interchangeables en pratique, sous la vigilance de vastes mass-media concentrés, qui s’efforcent, avec plus ou moins de succès, de former les opinions correctes; cet aspect, particulièrement grotesque en France, semble connaitre un moment de contradiction et de recul temporaires dans l’ensemble de la super- société occidentale, avec des options politiques offertes au choix des citoyens momentanément plus tranchées.
La vie occidentale, c’est encore par exemple, du point de vue « intra-cellulaire », la dictature sans grands contrepoids désormais du chef (et, en bout de chaine, du détenteur de capital) sur le « salarié » , dont chaque sourire vise peu ou prou à « sauver une place » en permanence menacée ; rien de moins démocratique en effet que « l’entreprise », encensée, non sans paradoxe, comme le Telos de toute vie humaine en même temps que la « démocratie ».
Il y a là matière à de lourds volumes ; la plupart restent à écrire, tant est nouveau le phénomène qui se produit par chez nous. Je passe sur le pénible volet géopolitique, le mieux connu.
Risquons donc seulement une hypothèse. Nul n’ignore que l’Occident nouveau se caractérise par une déchristianisation aussi rapide que profonde. Le phénomène stupéfie par sa fulgurance en Irlande ou en Espagne ; il est plus ancien en France, et dans d’autres régions de la super-société naissante. Le capitalisme s’est avéré plus efficace pour détruire l’antique foi chrétienne que son rival malheureux marxiste : la Russie et la Pologne sont désormais parmi les seules nations d’Europe ou le christianisme joue un rôle majeur et public; Polonais et Russes n’ont sans doute jamais cessé de rester chrétiens, au grand désespoir des propagandistes « sans-dieu » et persecuteurs, qui n’ont manqué de se lamenter de leurs échecs répétés. Il arrivait de voir en Russie jusqu'a des membres du Parti secrètement chrétiens.
La "laïcité à la française" ouvre peut-être la voie à un trait inédit de la vie occidentale en gestation: la relégation de la vie spirituelle, quelle qu'elle soit, dans un espace purement privé, c'est à dire secret, dissimulé aux regards, comme un élément en quelque sorte pornographique de la vie.
La spiritualité voisine bientôt avec la vie sexuelle, la fonction excrémentielle, et la Mort elle-même, dans un recoin honteux et caché de la vie.
La voie est libre, la consommation peut alors prendre bientôt la place qui lui est due, c’est à dire, plus ou moins - toute la place.